En 1996, les choses allaient rondement au sein de la PME marievilloise. Le fondateur, Jean Gladu, avait réussi à transformer sa petite entreprise de coupe et d’aiguisage d’outils en un fleuron de l’économie de la ville. Son décès subit, à l’âge de 50 ans, ne lui a pas permis d’être témoin de tous les changements qui allaient survenir au sein de sa corporation dans les années à venir. Aujourd’hui, NAP GLADU est la source la plus importante et la plus complète d'outils de coupe au carbure et en diamant, et de service pour les industries du bois, du métal et du plastique en Amérique du Nord.
À l’époque, c’est le fils de M. Gladu, Jean junior Gladu, âgé de seulement 22 ans avec son diplôme universitaire fraîchement imprimé, qui a repris les rênes de cette compagnie qu’il avait à cœur. S’en est alors suivi une expansion aussi importante que fulgurante. Près de 100 nouveaux travailleurs ont été ajoutés à l’équipe entre 1996 et 2000. Il faut dire qu’à ce moment, l’économie américaine (65% du marché d’Outils Gladu) avait le vent dans les voiles. Une conjoncture idéale et une série de judicieuses décisions ont permis à l’entreprise familiale de devenir l’une des 300 plus grandes PME du Québec. En 2006, Jean Junior Gladu vend l’entreprise au consortium américain Cameron qui fusionne l’entreprise marievilloise à NAP Tools, une corporation similaire originaire de Jasper en Indiana. Pour les employés, le choc est total. Ils devront, au cours des années à venir, s’habituer à une nouvelle façon de travailler et forger une identité commune avec ce nouveau joueur.
Choc culturel
« Ça été un véritable choc culturel » affirme Christiane Viens, actuelle coordonnatrice des ressources humaines à Marieville. Celle qui est en poste depuis 1987 a dû composer, tout comme plusieurs de ses collègues, avec l’arrivée de la langue anglaise dans la quotidienneté des opérations. « Étant donné que la plupart d’entre nous maîtrisaient la langue anglaise et qu’eux ne parlaient pas le français, nous avons dû nous habituer à utiliser l’anglais dans nos communications avec eux. Non seulement devions-nous nous ajuster à cette nouvelle façon de communiquer, mais nous avons également eu à nous mettre en tête que notre nouveau patron était aux États-Unis et qu’il ne nous connaissait pas personnellement », indique-t-elle.
« Nous sommes passés d’une entreprise familiale où le propriétaire était directement impliqué dans les opérations quotidiennes à une entreprise nord-américaine dont l’administrateur prenait ses décisions à distance à partir des informations que nous lui transmettions. Nous avons eu à modifier notre façon de communiquer », ajoute Claude Berlinguette, Directeur régional de la fabrication et du service pour Marieville et la Beauce.
Il aura fallu près de trois ans avant que les employés des deux entreprises fusionnées mettent de côté leurs méfiances et leurs appréhensions. En 2009, quand le département des ventes a été attribué à la filiale américaine et que la production s’est concentrée au Québec, l’arrimage entre ces deux entreprises familiales s’est fait de lui-même. « Ils ont subi le même choc que nous. Il fallait laisser le temps au temps, maintenant, les affaires se déroulent à merveille », ajoute M. Berlinguette.
Valeurs et culture
Aujourd’hui, une fois le choc passé, les employés des filiales canadiennes et américaines de NAP GLADU constatent que la majorité de leurs valeurs respectives se ressemblent beaucoup. « Pour eux comme pour nous, le service à la clientèle est primordial. De notre côté, nous misions sur la rentabilité alors que du leur, le chiffre d’affaires était important. Nous nous sommes ajustés de part et d'autre », affirme M. Berlinguette. Les nouvelles valeurs de la corporation fusionnée pourraient se résumer ainsi : service à la clientèle, coopération, rentabilité et stabilité/sécurité pour les employés. Voilà une description qui n’est finalement pas très différente de ce qu’étaient les valeurs à l’époque d’Outils Gladu.
Encore vendue : une transition plus douce
En juillet 2012, NAP GLADU a été vendu à un autre consortium américain du nom de TENEX. Cette fois-ci, la transition est réellement plus douce. D’une part en raison du contexte économique, mais également parce que les dirigeants de TENEX étaient bien préparés. « En 2006, la vente et la fusion de l’entreprise se sont déroulées dans un contexte de prospérité économique. L’arrivée d’un nouveau membre insécurisait les employés. En 2012, le portrait est tout autre. La conjoncture est moins favorable et les employés comprennent que la concurrence est féroce dans notre domaine. L’arrivée de TENEX amène de l’espoir pour nous tous », indique M. Berlinguette. « De plus, ce nouveau consortium était bien préparé et savait comment agir pour que la communication soit efficace et rassurante pour nous. Les employés saisissent très bien les enjeux reliés à notre industrie et ils ont réellement à cœur la réussite de NAP GLADU », conclut Christiane Viens.
Le fondateur Jean Gladu ne se doutait certainement pas de tous les changements qui surviendraient au fil des ans au sein de la corporation qu’il a créée. Il serait aujourd’hui certainement très fier de voir avec quelle résilience et avec quelle ardeur, les employés de NAP GLADU ont su relever les défis et faire face aux changements.
Source : inspremag.ca
Par : Guylaine Lebel