Première erreur, l’étiquette du vin était tournée vers lui. Jusque là, ça pouvait encore aller. Deuxième erreur, la bouteille était placée sous son aisselle. Là, nous avons commencé à nous inquiéter. À l’aide du couteau de son limonadier, il a alors débuté un long et fastidieux carnage. Il a littéralement déchiqueté la coiffe en petits morceaux avant de tenter (je dis bien tenter) d’insérer son tire-bouchon dans le bouchon. Il ne cessait de se reprendre, arrachant à tout coup quelques éclisses de liège. Dans une logique que je n’arrive toujours pas à m’expliquer, il a décidé de renverser la bouteille, la tête en bas, pour une nouvelle tentative d’insertion de tire-bouchon. En arrière plan, on pouvait voir 18 convives sidérés, éberlués et très préoccupés. Il était également possible d’entendre Michel prévoir la fin de cette aventure tel un commentateur sportif : « Il va casser le bouchon ! Il va casser le bouchon ! » s’exclamait-il. Finalement, devinez quoi ? Il a cassé le bouchon. C’est alors, qu’au lieu de se reprendre devant ses clients, comme cela est de mise, il est parti dans les cuisines. Un immense fou rire s’est alors emparé de la table. Nous avons ri de bon cœur de cette série de bévues qui, n’avait rien de grave dans l’absolu, mais qui titillait gravement la bande.
À son retour, avec la bouteille ouverte à la coiffe effilochée, nous lui avons demandé pourquoi il n’avait jamais déposé la bouteille sur la table ? Il nous a répondu que son patron voulait qu’il ouvre ses bouteilles dans les airs afin d’avoir le style italien. « Il a plutôt eu le style incompétent » a ensuite commenté Nancy déclenchant l’hilarité générale de la table. Finalement, ce serveur, que je qualifierais de burlesque, nous a mis de bonne humeur et ce vin, qui a failli ne jamais être bu, était, semble-t-il très bon !